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La sévérité de la maladie COVID-19 dépend-elle de la dose de virus reçue ?

Texte mis à jour le 2021-04-18


De nombreuses observations suggèrent que la sévérité de la maladie COVID dépend de la dose infectieuse. Le port du masque semble non seulement diminuer la transmission, mais aussi l’intensité des symptômes en cas de contamination. Il est important de porter un masque pour protéger les autres, pour réduire le risque d’attraper la COVID-19 et aussi pour réduire le risque de développer une forme grave de la COVID-19 en cas d’infection.

La sévérité de la maladie COVID dépend de la dose infectieuse.

L’idée selon laquelle la sévérité d’une maladie virale dépend de la dose infectieuse ou inoculum viral (qui est la quantité de particules virales absorbées qui a déclenché l’infection) n’est pas nouvelle. Elle a été démontrée au laboratoire chez la souris pour le virus Influenza A, le SARS-CoV-1 ou le MERS-CoV et chez l’humain pour des virus non létaux comme le virus Influenza A de la grippe saisonnière.Une expérience réalisée chez des hamsters a montré que ceux qui reçoivent une quantité moins importante de virus SARS-CoV-2 développent des formes moins sévères de la maladie que les autres. Les études récentes sur des patients atteints de la COVID-19 confirment ces résultats.

Si l’inoculum est réduit, le système immunitaire a moins de risques d’être submergé par l’infection, et les symptômes de la COVID-19 seront faibles ou inexistants. Ce sera une forme légère de la maladie voire une forme asymptomatique. Au contraire, si l’inoculum viral est important, il va immédiatement infecter un grand nombre de cellules et le système immunitaire risque d’être dépassé. La personne malade développera une forme grave de la COVID-19.

Ces observations sur le lien entre la dose infectieuse et la gravité de la COVID-19 permettent d’expliquer pourquoi pendant l’été 2020, malgré un nombre important de nouveaux cas quotidiens de personnes infectées par le SARS-CoV-2, le pourcentage d’hospitalisations dues à la COVID-19 chez les personnes vulnérables n’a pas beaucoup augmenté. En été, les milieux plus aérés qu’en hiver, plus chauds et ensoleillés ont sûrement permis de réduire la quantité de virus présents dans notre environnement. On peut supposer que dans une grande partie des cas d’infections cet été, la dose infectieuse était plus faible, ce qui a pu entraîner la diminution du nombre de formes sévères de la COVID-19. Une autre explication de la faible proportion d’hospitalisations pendant l’été est que ce sont surtout les 20-40 ans qui ont été contaminés en juillet-août alors que chez les plus de 70 ans les tests positifs ont eu tendance à augmenter après l’été.

Le masque est un filtre qui réduit la dose infectieuse.

Le masque est un filtre qui fonctionne dans les deux sens. Les aérosols et gouttelettes que nous expirons sont en grande partie arrêtés par le masque, ainsi nous n’infectons pas les autres. Mais surtout, le masque filtre aussi les aérosols et gouttelettes qui sont présents dans l’environnement tout autour de nous. Il réduit la quantité de coronavirus SARS-CoV-2 que nous risquons d’inhaler et donc réduit la dose infectieuse. Voir la question Pourquoi mettre un masque ?.

II faut distinguer la dose infectieuse ou inoculum viral (qui est la quantité de particules virales absorbées qui a déclenché l’infection) de la charge virale (qui est le nombre de particules virales portées par un individu infecté à un moment donné et qu’il peut répandre dans son environnement). Le port du masque permet de réduire la dose infectieuse reçue lorsque l’on interagit avec une personne qui présente une forte charge virale.

Le masque réduit les symptômes de la COVID-19.

En laboratoire sur des hamsters, il a été montré que le masque protège des formes sévères de la COVID-19. Un autre argument soutenant le rôle protecteur du masque nous provient des bateaux de croisières bloqués en mer au début de l’épidémie de COVID-19. En février 2020, le “Diamond Princess”, est le premier bateau de croisière qui est resté 2 semaines en mer sans pouvoir accoster suite à la découverte d’un cas de patient atteint de la COVID-19. Les recommandations étaient encore floues sur la marche à suivre et il a été seulement indiqué aux passagers de rester dans leur cabine. Sur ce bateau, tous les passagers n’ont pas été testés mais le pourcentage d’individus infectés symptomatiques a été estimé grâce à un modèle statistique à 82%. Un mois plus tard, un autre bateau de croisière, le “Greg Mortimer”, a connu un destin similaire. Mais cette fois, les consignes pour faire face à l’épidémie avaient évolué et dès que le premier cas de patient atteint de la COVID-19 a été déclaré, des masques ont été distribués à tous les passagers, équipage compris. Tous les passagers ont été testés et sur ce bateau, où les passagers étaient masqués, seulement 19% des 128 passagers infectés par le coronavirus SARS-CoV-2 ont développé des symptômes et un seul est décédé. On peut donc penser que le port du masque a permis de réduire les symptômes de la COVID-19.

Le masque est une barrière essentielle pour réduire l’inoculum et ainsi nous protéger d’une forme grave de la COVID-19.


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Sources

Etude clinique chez des humains volontaires qui montre que dans le cas de la grippe, les symptômes présentés par les patients sont dépendants de la dose virale qui les a infectés: plus la dose infectieuse est importante, plus les symptômes sont importants.

Memoli, M. J., Czajkowski, L., Reed, S., Athota, R., Bristol, T., Proudfoot, K., ... & Davey, R. T. (2015). Validation of the wild-type influenza A human challenge model H1N1pdMIST: an A (H1N1) pdm09 dose-finding investigational new drug study. Clinical Infectious Diseases, 60(5), 693-702.

Dans le cas du virus influenza A responsable de la grippe, il a été montré chez des souris que plus le volume de l’inoculum est important, plus la forme de la maladie est grave.

Miller, D. S., Kok, T., & Li, P. (2013). The virus inoculum volume influences outcome of influenza A infection in mice. Laboratory animals, 47(1), 74-77.

Expérience en laboratoire réalisée sur des souris montrant que la sévérité de l'infection à un virus dérivé du SARS-CoV humain (contenant 6 mutations qui le rendent plus létal chez la souris) dépend de la dose de l'inoculum.

Roberts, A., Deming, D., Paddock, C. D., Cheng, A., Yount, B., Vogel, L., ... & Zaki, S. R. (2007). A mouse-adapted SARS-coronavirus causes disease and mortality in BALB/c mice. PLoS Pathog, 3(1), e5.

Expérience en laboratoire réalisée sur des souris transgéniques exprimant le récepteur CD26 humain montrant que la sévérité de l'infection au coronavirus MERS-CoV humain dépend de la dose de l'inoculum.

Tao, X., Garron, T., Agrawal, A. S., Algaissi, A., Peng, B. H., Wakamiya, M., ... & Couch, R. B. (2016). Characterization and demonstration of the value of a lethal mouse model of Middle East respiratory syndrome coronavirus infection and disease. Journal of virology, 90(1), 57-67.

Cette étude en laboratoire a montré avec un dispositif qui permettait de simuler l’effet du masque, que les hamsters qui portent un masque ont moins de risque d’être infectés par le coronavirus SARS-CoV-2 et que ceux qui tombent malades de la COVID-19 ont des formes moins sévères de la maladie que ceux qui ne portent pas de masques.

Chan, J. F. W., Yuan, S., Zhang, A. J., Poon, V. K. M., Chan, C. C. S., Lee, A. C. Y., ... & Tang, K. (2020). Surgical mask partition reduces the risk of non-contact transmission in a golden Syrian hamster model for Coronavirus Disease 2019 (COVID-19). Clinical Infectious Diseases.

Etude sur le Diamond Princess, bateau de croisière qui est resté 15 jours en mer en février 2020 sans pouvoir accoster après la découverte de cas de patients atteints de la COVID-19 parmi les 3711 passagers. Sur ce bateau, où il n’y pas eu de consignes particulières sur le port du masque. Tous les passagers n’ont pas été testés et grâce à un modèle statistique le nombre d’individus asymptomatiques a pu être estimé à 17,9% des personnes infectées par le SARS-CoV-2.

Mizumoto K, Kagaya K, Zarebski A, Chowell G. Estimating the asymptomatic proportion of coronavirus disease 2019 (COVID-19) cases on board the Diamond Princess cruise ship, Yokohama, Japan, 2020. Euro Surveill 2020; 25(10).

Sur un bateau de croisière, le Greg Mortimer, qui effectuait une croisière au large de l’antarctique en Mars 2020, un individu a déclaré la COVID-19 au 8ème jour de la croisière. Tous les passagers et membres de l’équipage ont alors reçu un masque et se sont mis à le porter. Pendant 28 jours, le bateau est resté en mer sans autorisation de débarquer et les passagers sont restés isolés du reste du monde. Sur les 217 passagers, 128 ont été infectés par le SARS-CoV-2. Mais seulement 24 passagers (19%) par le SARS-CoV-2 ont montré des symptômes de la COVID-19 et un seul est décédé. Tous les autres passagers infectés par le SARS-CoV-2, soit 104 individus (81%) étaient asymptomatiques.

Ing, A. J., Cocks, C., & Green, J. P. (2020). COVID-19: in the footsteps of Ernest Shackleton. Thorax.

Chez les patients infectés par le SARS-CoV-2 et hospitalisés, la charge virale détectée au moment du diagnostic est un facteur prédictif du risque de mortalité. Plus la charge virale est importante et plus le risque de mourir de la COVID-19 est important.

Pujadas, E., Chaudhry, F., McBride, R., Richter, F., Zhao, S., Wajnberg, A., ... & Cordon-Cardo, C. (2020). SARS-CoV-2 Viral Load Predicts COVID-19 Mortality. The Lancet Respiratory Medicine, Volume 8, Issue 9, e70

Parmi 76 patients hospitalisés, 46 ont développé une forme modérée de la COVID-19 et 30 une forme grave. Cette étude montre que les patients qui développent une forme grave ont une charge virale à l’admission plus élevée que les patients qui développent une forme modérée.

Liu, Y., Yan, L. M., Wan, L., Xiang, T. X., Le, A., Liu, J. M., ... & Zhang, W. (2020). Viral dynamics in mild and severe cases of COVID-19. The Lancet Infectious Diseases.

30 patients infectés par le SARS-CoV-2 et isolés dans un centre de quarantaine ont été suivis. Parmi ces individus, 13 (43%) étaient asymptomatiques. Au moment de la prise en charge, la présence de SARS-CoV-2 est plus difficile à détecter chez les individus asymptomatiques. La charge de SARS-CoV-2 disparaît plus rapidement chez les individus asymptomatiques que chez les individus symptomatiques.

Chau, N. V. V., Lam, V. T., Dung, N. T., Yen, L. M., Minh, N. N. Q., Ngoc, N. M., ... & Hong, N. T. T. (2020). The natural history and transmission potential of asymptomatic SARS-CoV-2 infection. Clinical Infectious Diseases, ciaa711.

Etude de modélisation qui montre que la transmission du SARS-CoV-2 est attribuable dans seulement 3,4% à 6,6% des cas à des individus infectés par le SARS-CoV-2 qui sont asymptomatiques. En revanche dans 46%-47% des cas, la contamination se fait par des individus qui sont présymptomatiques, dans les jours qui précèdent l’apparition des symptômes de la COVID-19.

Moghadas, S. M., Fitzpatrick, M. C., Sah, P., Pandey, A., Shoukat, A., Singer, B. H., & Galvani, A. P. (2020). The implications of silent transmission for the control of COVID-19 outbreaks. Proceedings of the National Academy of Sciences, 117(30), 17513-17515.

En France, le nombre de cas quotidiens de personnes infectées au SARS-CoV-2 a augmenté pendant l’été (en partie aussi parce que le nombre de tests effectués a augmenté aussi sur cette période). Début juillet, le nombre de cas quotidiens détectés était de moins de 1000. Entre début août et fin août, il est passé de 2000 cas par jour à presque 8000 cas par jour. En parallèle, le nombre quotidien de personnes hospitalisées pour la COVID-19 n’a pas augmenté dans les mêmes proportions. Il était environ de 100 par jour début juillet, et de 250 fin août.

Données Santé Publique France.

Etude qui a suivi des patients atteints de la COVID-19 et leurs cas contacts dont la charge virale a été mesurée le jour 1 et le jour 14 et le cas échéant, le jour d’apparition des symptômes. Cette étude montre que la charge virale des cas index (les individus qui ont infecté les cas contacts) est l'un des principaux facteurs de transmission du SARS-CoV-2: plus la charge virale du cas index est élevée et plus le risque de contagion est élevé. Chez le cas contact infecté, la charge virale initiale est corrélée au temps d’incubation: plus la charge virale est élevée et plus le temps d’incubation est court. Chez le cas contact infecté, un niveau de charge virale plus élevé au jour 1 était associé à un risque accru de développer une maladie symptomatique. Parmi les contacts, le risque de développer une maladie symptomatique était d'environ 38 % chez les personnes ayant une charge virale initiale inférieure à 1 × 107 copies par mL, contre un risque supérieur à 66 % chez celles ayant une charge virale initiale de 1 × 11010 copies par mL ou plus.

Marks, M., Millat-Martinez, P., Ouchi, D., h Roberts, C., Alemany, A., Corbacho-Monné, M., ... & Mitjà, O. (2021). Transmission of COVID-19 in 282 clusters in Catalonia, Spain: a cohort study. The Lancet Infectious Diseases.

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